samedi 27 mars 2010

anéanti

je vous préviens tout de suite, cet article n'aura absolument rien de drôle. Je tombe le masque que je portais depuis quelques mois, ou je régresse je ne sais pas. Bref, j'utilise ce blog pour sa fonction première: celle de me vider de ma souffrance.
Reprenons depuis le début. Je suis sorti avec un mec adorable qui sur le papier avait tout pour me rendre heureux. Cultivé, intelligent, nous avions vraiment les mêmes centres d'intérêt. .Mais l'histoire n'a pas fonctionné. Quelque chose ne l'a pas fait, je ne sais pas quoi. nous resterons amis ce qui me convient.
Aujourd'hui je dois aller chez le coiffeur. et hier, pris de faiblesse, je l'indique à Ralph qui n'était pas connecté. Il a le message ce matin et m'accorde une demie heure. je lui dis que je veux le voir davantage, passer un moment tendre et intime avec lui. il me dit qu'il a d'autres projets. et je comprends qu'il est avec quelqu'un, ce qu'il me confirme.
Evidemment, je me fais mal en l'appelant. Il parle à voix basse, et je comprends aussi que son mec dort encore à l'étage. Ralph est en couple libre avec lui "ce qu'il voulait depuis le début". C'est moi qui n'avais apparemment pas compris les règles. Sauf que je me souviens aussi que quand il était parti à Sète le premier été de notre rencontre, je lui avais demandé d'être sage et qu'il avait marqué à coté de son nom sur MSN "sage comme une image".
Voilà, aujourd'hui, je l'ai perdu une troisième fois sans jamais l'avoir reconquis. En 6 mois, je pensais avoir progressé avec ce blog, la musculation, la lecture, le ciné. ce n'était qu'un leurre...
Il était toujours dans ma tête, dans mon coeur, alors que lui avait d'un coup d'éponge, nettoyé le tableau.
Qu'est-ce qui cloche chez moi ? Pourquoi est-ce que je n'arrive pas à tourner cette saleté de page ???
Il faudra sans doute que je trouve un nouveau psy.
Je n'arriverai pas à vivre sans lui. Je n'en peux plus. Rendre les armes ??? j'y songe de plus en plus.
Ne me jugez pas, je me sens suffisamment minable comme ça.
Mais plus que jamais, j'ai besoin de vos commentaires

jeudi 25 mars 2010

bouge de là !


voilà une période particulière pour les enseignants ces temps-ci. Quand l'on rentre en salle des profs, celle-ci bruisse d'une seule et unique conversation. Non, pas les derniers exploits de la Pépite (dont je vous donnerai des nouvelles en fin d'article ... si vous avez été sages). Il y est plutôt question de points, de lieux, de poste spécifique, de SNES, SGEN, SGEG, SNALC, SNIFF, SMURF, SLURP (quelques intrus se sont glissés dans cette liste, sauras-tu les retrouver ?).
Ceux qui sont du coté obscur de la force ont compris que je parlais des mutations.
Alors tentons d'expliquer le plus simplement possible cette période aux autres.
En Mars, avec les hirondelles, arrivent les mutations intra académiques : les profs qui le souhaitent peuvent formuler une vingtaine de voeux pour changer de département, de ville ou d'établissement. La réponse nous est donnée autour du 18 juin (comme l'appel ). Et pour départager ces enseignants courant après la terre promise (l'herbe est toujours plus verte ailleurs) il y a le fameux barême des points.
le grand classique dans cette période ?
le coup de fil à un ami ! le prof refait 40 000 fois le numéro de Madame Irma l'oracle de Delphes les syndicats pour obtenir les précieuses informations qui vous permettront de niquer la gueule des autres postulants obtenir le poste convoité.
Dont acte pour moi ce matin:


"Oui bonjour je vous appelle parce que je suis en train de faire mes voeux et je ne comprends pas le calcul de mes points. je devrais avoir 170 points et on me dit que je n'en ai que 80.
- d'accord regardons ça ensemble. Pourquoi 170 points ?
-ben je suis agrégé donc j'ai le droit à 90 points si je demande un lycée, non ?
-oui, tout à fait. Mais vous l'avez eue à l'interne ou à l'externe, votre agreg ?
- euh, ben à l'interne (ton piteux)
-attendez je vais voir avec ma collègue si ça fait une différence .... (longue attente angoissée où on se dit que merde, on s'est pas cassé le tronc à passer cette agreg pour que pouic, bordel). allooo ? non, il s'avère que c'est la même chose. Mais vous avez demandé un établissement ?
- ben oui, y a pas 40 ooo lycées, donc il faut bien que je demande un établissement précis en rentrant son nom ?
- nan, il faut faire un voeu type commune poste lycée
- gnéééé ?
- vous demandez d'abord une commune.
- D'accord (un temps) c'est fait ! (ça vous rappelle une conversation avec une hotline ? moi aussi)
-maintenant, vous avez une fenêtre qui s'affiche. cochez lycée. ça marche ?
- ah oui, c'est bon. mes 170 points apparaissent.
-bien. vous êtes tzr ?
- non, je ne le suis plus. Mais si je demande pendant 2 ans de suite un même poste, c'est bonifié ?
-uniquement si vous avez la dame de pique.
-je l'ai pas, mais en revanche j'ai acheté la rue de la Paix.
-non, ça, ça ne fonctionne que si vous faites un 21.
-ah, et si j'ai une figure ?
- non, ça, ça fonctionnait y a deux ans, et que si vous étiez à gauche du donneur. Maintenant, il vous faut une tierce franche.
- dernière question, j'ai réussi à avoir un camembert marron, ça compte ?
-uniquement si vous êtes marié ou pacsé. Voilà monsieur. N'hésitez pas à nous rappeler si vous avez un problème, mais vous voyez que c'est pas si compliqué !
- ....."

Et le plus drôle, c'est que tu ne sais que 3 mois plus tard si tu as gagné...


PS: allez chose promise, chose due, l'instant Pépite.
Elle va bien, merci pour elle. elle continue à remplir le cahier d'appel de runes mystico-davincicodesques, mais petite nouveauté, elle nous envoie des élèves maintenant.
Parfois, on voit débarquer une âme en peine qui frappe à la porte:
" Ben c'est la Pépite qui m'a renvoyé ...
- ah bon ? on peut savoir pourquoi ? tu t'étais mouché ?
- ????
- nan rien, laisse tomber. allez viens dans la maison du bon Dieu."

Le plus marrant, c'est que l'ensemble des profs reste blasé...

jeudi 18 mars 2010

introducing La Pépite


Sur mon emploi du temps figure ce que l'on appelle l'heure de vie de classe. Elle est à la charge du professeur principal qui doit, pendant cette heure, régler les problèmes que la classe rencontre et les guider dans leur orientation.
Pour ma part, je guide une cinquième de l'ombre crépusculaire à la lumière de la connaissance...
enfin, non, je leur apprends à lire correctement leur bulletin, à ne pas oublier leurs affaires ou encore à commencer à réfléchir à un métier. Dans le meilleur des cas.
Parce que 90% du temps, ça vire au bureau des pleurs. D'habitude, je canalise, mais comme j'ai un blog sur le feu, aujourd'hui, j'ai laissé s'écouler les cascades de larmes, espérant égoïstement pêcher dans le torrent la pépite qui permettrait un bon article.
j'ai donc eu le droit à :
* c'est possible de ne plus avoir de langue à la cantine ?
* les toilettes des 5°, ils sentent le mort
* le chauffeur de bus, ben, il dit pas toujours bonjour
* parce que la langue, ben, ça nous donne envie de vomir
* y a pas toujours du papier toilette dans les toilettes (lesquelles ? celles qui sentent le mort ?)
* les pates, elles manquent de sel
* parce que la langue, elle était mal préparée, y avait encore des pics blancs et de l'herbe
* on peut pas mettre du papier toilette parfumé ?
* des fois, y a des cheveux dans les assiettes.
* et pour la langue, vous pouvez faire quelque chose ?

voili, voilà. et démerde-toi avec ces requêtes. Donc, le prof essaie au mieux de répondre, et au pire, il prend un stylo et un air lassé, en faisant semblant de prendre des notes alors qu'il rédige en fait sa liste de courses.
vous aurez noté par ailleurs les préoccupations des élèves: la bouffe et la cague, comme les canards. et vous avez également noté que la langue n'a pas remporté un beau succès.
oui, mais qui vient à point à qui sait attendre...
la pépite !

alors, comment vous donner envie de lire la suite ?
Si je vous dis que OuinOuin a essaimé aux 4 vents, qu'elle a fait des émules et qu'apparemment, elle a une frangine spirituelle ...

Donc au milieu des jérémiades sur la langue ou sur les chiottes, jaillit la prof d'anglais.
J'avoue, je l'avais déjà repérée ou du moins je m'étais dit qu'il y avait un certain potentiel. Il y a 15 jours, j'étais allé la voir pour lui dire qu'il fallait qu'elle rentre les appréciations de ma classe afin que je puisse préparer le conseil :

" ah bon ??????? c'est maintenant les conseils ?
- ben, en fait, la date limite pour rentrer les appréciations et notes, c'était y a deux jours.
-ah bon ??????
-c'était indiqué sur le tableau d'information et on a tous eu une note dans notre casier
-ah bon ???????
-euh, c'est moi ou y a de l'écho ?
- ah bon ????? je le ferai dans 4 jours, je peux pas avant.
- mais le conseil, c'est demain !
- ah bon ????
-dans 4 jours, les parents auront reçu les bulletins !
- ah bon ?????"

Bref, je me suis dit qu'il y avait un certain potentiel, mais Ouin Ouin avait placé la barre très haut. Un oubli, ça peut arriver.

Sauf que là, pendant cette heure de vie de classe, j'ai vu qu'on avait dépassé le stade du potentiel. Non, là, c'est une vraie, une battante, elle est venue pour gagner.

sur le cahier d'appel, nous consignons les absents, et nous avons une petite case pour indiquer qui n'a pas son carnet de correspondance. ça évite ainsi aux collègues d'avoir un gamin qui lui dit qu'il n'a pas son carnet pour éviter un mot. Sauf que cette case, pour aujourd'hui, est barbouillé de hiéroglyphes rouge sang. des signes tribaux ? non, un message: "K renvoyé/ cause: mouchoir N+ D dehors. pas de délégués ici ?" suivi de l'heure.
curieux par nature, je m'enquis auprès des élèves pour savoir ce qu'ils avaient eu à l'heure indiquée. Dans le mile, anglais !
et au fil des plaintes des élèves, je reconstitue l'histoire.

la Pépite ne peut pas se voir Michel. Elle lui reproche de sans cesse bouger et de lui couper la parole à tout bout de champ. chez moi, la différence, entre Michel et une plante verte, c'est que la plante remue quand le vent s'engouffre dans les feuilles ...
Bref, Michel rentre, s'installe et la Pépite lui bondit sur le pédoncule en lui intimant de se taire. Michel obéit connement et ne répond pas à son nom au moment de l'appel. ça ne plait pas à la pépite qui expulse manu militari notre plante en pot. Mais pour cela, il faut qu'elle fasse accompagner le végétal par un délégué.
elle se tourne vers Jean Jacques et lui demande s'il est délégué. Pas de pot, Jean Jacques n'est pas délégué (ironie du sort, il s'était présenté en plus ...). il a donc eu une punition ... parce qu'il n'était pas délégué.
C'est à ce moment là que Noémie, élève plafonnant à 18 de moyenne, s'est mouchée. la Pépite l'a pris pour une attaque personnelle, et lui a collé un rendez vous avec les parents.
bref, en moins de 3 minutes, une tuerie, une "boucherie héroïque" où une plante verte, un candidat malheureux et une bonne élève enrhumée en ont pris pour leur grade ...

je sens qu'elle va faire parler d'elle, la pépite. Je sens un filon, là ....

lundi 15 mars 2010

alors, il parait que ....


J'évoquais dans un précédent post la vitesse de propagation des informations, vraies ou fausses, entre les élèves.
Je sais pas, ils doivent avoir un langage secret, du morse spécial élève avec un code hyper élaboré, du style

* tu tousses 3 fois, c'est que la grippe aviaire a touché la classe de quatrième C
* tu fais tomber ta règle une fois, ça signifie que Machin a eu un rapport sado maso avec Trucmuche
* tu demandes à ouvrir une fenêtre, c'est que le prof de français dépressif a fait une tentative de suicide.

Ou alors, ils communiquent par ultrasons ? On sait bien qu'il existe certains sons inaudibles pour les plus de 25 ans. Peut être ont-ils appris à muter ?

Bref, toujours est-il que ces temps-ci, radio moquette a fonctionné à plein tube. Comme l'impression de bosser à la rédaction de Closer ou Voici. Ou dans une maison de retraite.

En fin de semaine dernière, les pompiers sont venus. (Je demande remboursement, j'en ai pas vu un seul). Ils se sont déplacés pour préparer l'ASSR (attestation scolaire de sécurité routière).
et dès la première heure, ça a pas raté :

"M'sieur ?
-Vuiiiii ?
-c'est vrai qu'on va être fouillés ?
-souillés ? non, je garde mes postillons pour moi, habituellement. Je suis pas partageur.
-nannn, fouillés ?
-pourquoi tu veux être fouillé ? T'as vu Basic instint ou Body hier sur W9, et ça a réveillé tes ardeurs ?
-heiiiin ?

oui, lecteur, je le confesse : mes références sont trop vieilles, ils captent pas. c'est un classique. Comme je fais toujours un bide d'incompréhension quand, pour mettre fin à des bavardages, je leur dis "la réunion Tupperware, dans le fond, c'est fini ?". Mais m'en fous, je la fais inlassablement chaque année. bref, reprenons.

-ben, c'est parce que y a les pompiers dehors. et y a un copain, qui m'a dit qu'une fille de 4°E avait entendu une 3°F qui disait que le prof de sport avait dit aux 6° A qu'ils allaient être fouillés !
- Et les 5° W, t'en fais quoi dans l'histoire ?
-heiiiin ?

oui, lecteur, je le confesse: j'use et j'abuse de l'ironie. et là non plus, ils captent pas.
Je le confesse également, je suis d'un naturel sadique joueur et j'ai donc voulu m'amuser un peu à leurs dépens:

-ben, je dois pas te le dire, mais oui, c'est vrai, vous allez être fouillés ...
- c'est parce qu'on n'a pas le droit d'avoir des portables, et que y en a qui en ont ?
- (tiens donc, c'est bon à savoir, ça ...) ben voilà c'est pour ça ! (merde, j'aurais du dire "non, c'est pour autre chose". j'en aurais encore appris davantage).

et là, je vois 2 réactions chez les loulous. Soit ils restent d'un calme dalaïlamaïesque (dites le 10 fois de suite, vous verrez, c'est rigolo), du style "j'ai ouvert 3 chakras hier, alors c'est pas l'autre et son histoire de pompier qui vont me les refermer"; soit ils se regardent complètement paniqués, l'oeil aux aguets, la respiration sifflante, trempés de sueur. Bref, ils ont un portable.
le temps pour moi de noter mentalement les noms des heureux possesseurs de mobile (ça peut toujours servir, niac niac niac), et j'enchaîne :


"Et puis, il y a autre chose que je devrais pas vous dire (z'avez pas un peu vu cet art de dramatiser, hein ?). en fait, les pompiers sont venus pour arrêter le principal. Il aurait essayé de tuer la CPE parce qu'elle avait pas imprimé les bulletins assez rapidement.
cri d'effroi dans la salle.
-bon c'est pas tout ça, mais on doit étudier le conditionnel aujourd'hui. Quelqu'un aurait des idées de phrases-exemples ?"

Bon, allez, j'avoue. Au bout de 5 minutes, je me suis dégonflé et je leur ai dit que c'était du pipeau.

"Ouais, M'sieur, on vous avait pas cru, de t'façon!
-à la bonne heure ! Mais un petit conseil qui vaut ce qu'il vaut, Kevina, évite de te repointer au collège avec ton portable ... On sait jamais. Oh, et je te déconseille le poker, on lit en toi comme dans un livre ouvert..."

ce matin, j'apprends que deux nouvelles rumeurs courent sur ... OuinOuin. Et oui, malgré son départ, elle continue de hanter de sa présence démentielle les couloirs de l'établissement. je vous les livre:
1/ Les profs de français ont été odieux avec OuinOuin, ont pété un cable, se sont fâchés tout rouge contre elle, et l'ont fait pleurer.
2/ OuinOuin et le prof avec qui elle covoiturait se sont embrassés fougueusement sur le parking du collège un soir de pleine lune.

Tout ce que je peux dire sur le sujet, c'est qu'une rumeur est juste ....

dimanche 14 mars 2010

dexter saison 4


Je sais que TF1 commence à peine à diffuser la première saison de cette série si dérangeante, et pourtant si prenante qu'est Dexter.
Pour ma part, je viens de finir la saison 4, et je recommande donc aux néophytes qui découvriraient les aventures de notre tueur en série préféré de ne pas lire les lignes qui suivent. Je fais d'ailleurs la même recommandation pour ceux qui n'ont pas vu la saison 4 en intégralité. (mon but n'est pas de tout révéler, mais ce serait dommage que votre plaisir soit gâché par des spoilers). Par conséquent, je suis en droit de poser une question légitime : y-a-t-il un lecteur dans la salle ?

Commençons par la séquence inaugurale qui déjà rompt en partie avec les autres saisons. En effet, si l'on y retrouve la touche d'humour que l'on avait (rappelez vous le résumé des vacances que Dexter fait à son dentiste), on rentre directement dans l'action puisque l'on y découvre les agissement d'un nouveau tueur en série: Trinité, ainsi surnommé en raison des cycles de 3 meurtres qu'il accomplit depuis 30 ans.
Autant ne pas y aller par 4 chemins : sous des dehors finalement bonhommes, Trinité est le tueur le plus monstrueux de toutes les saisons de Dexter. et La saison 4 est pour moi la plus réussie.
aucun des personnages secondaires n'a été sacrifié, y compris Laguerta qui était trop en retrait à mon goût dans les 3 premières saisons. Si sa storyline n'est pas exaltante, elle apporte un joli contrepoids à l'intrigue principale.
Toutes les promesses faites en fin de saison précédentes sont tenues, avec plus ou moins de retard. Ainsi, le fait que Deb enquête sur son père occupe-t-il une première partie de la saison 4 puis est éclipsée pour revenir en force dans les derniers épisodes.
La question de la vie de famille et de la paternité ainsi que des responsabilités qui en découlent est au centre de cette saison. elle occupe bien sûr l'esprit de Dexter, mais également celui de personnages secondaires comme Deb ou même Trinité.
Aucun épisode ne manque de rythme et on ne ressent pas l'essoufflement du milieu propre à chaque série (comme on peut le vivre en ce moment dans Desperate Housewives).
Enfin, Dexter est une série qui n'a pas peur, qui ose et qui le montre lors des dernières minutes de son finale qui restera tristement gravé dans les mémoires...
5/5

Pièce montée


Je ne sais pas pour vous, mais moi les mariages n'ont jamais chamboulé ma vie. Entendons-nous bien: je me suis souvent bien amusé, j'ai bien mangé, j'ai peu bu (je suis pas alcool) mais j'ai toujours eu la peau du ventre bien tendue. Merci vous savez qui !
C'est souvent une soirée très sympa, l'occasion de revoir la famille dispersée aux 4 vents. Mais l'évènement le plus marquant, c'est peut être Tante Agathe bien imbibée qui monte sur la table, le verre à la main.
Bref, je me suis jamais dit au lendemain d'un mariage: "Whaou, comment que ma vie , elle a trop changé, c'est trop chemé, un truc de guedin!" (Oui, il m'arrive de parler djeunz, c'est ça être polyglotte).
Et ben, au ciné, c'est jamais comme ça. Ils ont parfois leur tante Agathe à eux, mais surtout, ils ont pris des grandes décisions ce soir là, qui changeront à jamais le cours de leur vie.
Apparemment, on y rencontre l'être cher (4 mariages et un enterrement) on se sépare ou on y apprend un lourd secret (Mariages).
Pièce Montée ne fait pas défaut à la règle: chaque personnage va embrasser son destin, avec fougue et passion, le soir de la cérémonie (oui, je sais, c'est beau, il m'arrive de me lancer dans le lyrisme, c'est ça, être polyglotte).
Et l'on dévide le catalogue des possibles avec les différents couples en présence:
Les mariés qui devront affronter l'épreuve de la confiance en l'autre (Jérémie Renier, toujours aussi cute, et Clémence Poésy, dont le jeu d'actrice se résume à 3 expressions faciales: je pleure / je suis offusquée/ j'ai les yeux exorbités de surprise; on se croirait revenue au temps du muet).
le couple mal assorti, qui se délite pendant que les autres se trouvent et s'aiment ( Christophe Alévèque, beauf accroché à sa voiture et dont une scène dans un restoroute suffit à nous le faire détester avec délices / Léa Drucker, sensible et touchante quand elle dit à son mari qu'elle n'aime pas ce qu'il sont devenus). Sans doute le couple le plus réaliste.
les parents et beaux parents, qui évidemment se détestent. cette fois-ci, sans doute, les personnages les plus convenus.
l'extravagante que tout le monde tolère, mais qui cache finalement un mal être (Julie Depardieu, à l'aise dans ce type de personnages); la vénéneuse presque blasée (troublante Hélène Fillières), la froide frangine qui s'occupe de tout, y compris d'écarter une petite trisomique de laphoto officielle (Julie Gayet), la vieille fille qui craque (Charlotte de Turckheim, la plus sacrifiée du casting) ...
Rien que de très convenu dans la galerie des personnages, en somme.
Oui, mais un couple s'empare finalement du film, celui des vieux amants. Jean Pierre Marielle, toujours magistral dans son rôle de vieux bougon, est rattrapé par son passé amoureux alors qu'il est devenu prêtre. Ebranlé, il est en pleine crise de foi (oui, il m'arrive d'être cliché, c'est ça être polyglotte), ce qui nous vaut une réplique bien sentie. s'adressant à Dieu , Marielle , excédé, lance: "une réponse une fois dans ta vie, ça t'arracherait la gueule?". Il se décide enfin à rejoindre Danielle Darrieux. Une scène fort jolie entre les deux amants sur un banc au clair de lune. Oui, je sais, ça peut faire culcul sur le papier. Mais c'est joué par 2 monstres sacrés. Et tout de suite, ça a une autre gueule. Darrieux est sublime, sans âge et c'est elle qui donne à ce film son supplément d'âme ...

3/5

samedi 13 mars 2010

vous habitez chez vos parents ? oui !

"Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme ce sera moi.(...) Que la trompette du Jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenter devant le souverain juge. Je dirai hautement : " Voilà ce que j'ai fait, ce que j'ai pensé, ce que je fus. J'ai dit le bien et le mal avec la même franchise. Je n'ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon, (...) Je me suis montré tel que je fus ; méprisable et vil quand je l'ai été, bon, généreux, sublime, quand je l'ai été".
Rousseau, Les Confessions.

Oui, il me faut citer Rousseau pour vous raconter un grand moment de solitude tout récent. Rousseau et aussi un petit coup dans le nez (miam la glace au Bailey's).
Donc sublime, je ne l'ai pas été, ça c'est le moins qu'on puisse dire.

Je vous situe un peu la scène: la fameuse salle de muscu qu'est pas une salle de PD. Je la fréquente depuis un bon mois, à raison de 4 séances par semaine, et les résultats commencent à apparaître, merci.

Là bas, entre autres éphèbes testostéronnés, j'ai repéré un jeune homme, ma foi, fort séduisant. Jeune puisque je lui donne à vue de nez 23 /24 ans et séduisant, puisque pas une montagne de muscles, mais dessiné et fin. Ajoutez à cela un visage romantique, presque timide, un peu à la Josh Groban ou Renan Luce, et vous avez un Will qui fond comme neige au soleil.
Je l'observe pendant quelques séances, et mon gaydar se met en route. Pour les non initiés au coté obscur de la force, le gaydar est un radar que tout homosexuel possède (ou qu'il devra acquérir très vite) et qui lui permet de repérer les autres homos dans la savane et ainsi se mettre en chasse. C'est génétique, c'est livré à la naissance avec tout un kit comprenant ent
re autres le sens de la tenue vestimentaire, un goût prononcé pour les paillettes et la cuisine et la faculté à devenir le mec idéal pour le sexe ... opposé.
Concernant mon Gaydar, faut que je passe chez Midas parce qu'il déconne un peu trop souvent. En même temps, il me sert pas à grand chose parce que ma timidité m'empêche ensuite de me mettre en chasse.

Bref, il y a quelques jours, je tente une approche (pathétique ? ah oui, au moins ça !). le voyant soulever un haltère (oui, c'est masculin, je viens de vérifier) qui me semble bien lourd, je me lance:
"Dis moi, tu soulèves combien, là ? Juste pour me donner des complexes. (Oui toujours flatter le mâle dans la première approche. Quoi, c'est ringard ? bon, d'accord c'est ringard).
-là, je soulève 18 kilos.
-ah euh, c'est bien dis donc, lui dis-je en tentant de cacher mon pitoyable haltère de 5 kilos.
-oui, mais ça fait 6 mois que je suis là. vous verrez, au
bout d'un moment, vous y arriverez vous aussi.
Et là, je saute sur l'occasion d'un rapprochement, au moins pronominal dans un premier temps, et grand seigneur, je lance un classique:
-Tu peux me tutoyer !
-Ok. et je vous conseille de faire des séries plus courtes, mais avec davantage de poids.
- Tutoie-moi, le reprends-je en constatant, piteux, que malgré mes efforts mentionnés plus haut, il a remarqué mes haltères de 5 kilos.
-OK, Et puis, il faut que vous mangiez beaucoup de protéines pour prendre de la masse.
-Vraiment, je me permets d'insister: tutoie-moi ! (Bordel, il la veut son haltère de 5 kilos dans la tronche ?)
-OK, mais euh, je peux vous demander un truc ?
Et alors, l'espoir renait. Je me dis qu'à défaut de me tutoyer, il va peut être me demander ... en mariage !
-vuiiiiiiii ?????
-Vous êtes pas prof de français ?
douche froide.
-euh, si.
-Vous enseigniez pas au collège de ..... il y a 5 ans.
douche gelée.
-euh, si.
-Vous aviez pas la classe de 3°H ?
douche glacée. Une part de mon esprit s'accroche au fol espoir qu'il est soit très fort à ce jeu-là, soit a des dons de voyance. Je sais pas, peut être qu'il lit dans les haltères de 18 kilos ... Mais le couperet tombe:
-Je suis Kévin Jesaisplus
koi. Je t'ai eu comme prof y a 5 ans !
- Et ben, je te permets pas de me tutoyer !" (mode mauvaise foi ON).

Et là, je me dis que c'est finalement une chance d'être timide. Avec ma pitoyable approche, il a rien vu venir (enfin, j'espère !!!!). Par contre, ce qui serait pas mal aussi, ce serait d'avoir une mémoire qui se souvient davantage des anciens élèves.
Ah oui, pour la petite info, j'ai fait le calcul, et il se trouve que le bel éphèbe a tout juste ...18 ans (beau comme un enfant, fort comme un homme, mais moi j'ai pas mis d'or dans mes cheveux). Bref, étant peu enclin à rejouer Mourir d'aimer, j'ai vite calmé mes ardeurs.

Quand je vous disais qu'il me fallait au moins Rousseau et une glace au Bailey's pour avouer ce grand moment de solitude.


vendredi 5 mars 2010

avec la participation exceptionnelle de ... Ouin Ouin


ça, "exceptionnel", c'est le terme ....
Il y a quelques temps, une collègue a du se faire opérer et a donc du s'absenter pendant un mois. D'abord, une période de latence où les loulous n'ont pas eu de prof (c'est classique, il faut que le rectorat se retourne et puise dans son vivier de TZR * frétillants et disponibles). Mais là, de TZR point :

"Le rectorat se trouva fort dépourvu
quand la bise fut venue
pas un seul petit morceau

de complément de service ou de remplaçant dispo
il alla crier famine
chez l'ANPE sa voisine

la priant de lui prêter

quelque étudiant pour subsister
"

Pour ce qui concerne la paie, intérêt et principal, je ne suis pas sûr que la dite étudiante ait été forcément gagnante. Ayant eu mon concours dès la première fois, je n'ai pas goûté aux joies des vacataires, mais j'ai cru comprendre que leurs conditions de travail étaient assez effroyables...

Avec l'ANPE, c'est la roulette russe. On peut tomber sur de véritables perles ou on peut avoir ... ouin ouin.

Ouin Ouin arrive donc un matin brumeux, emmitouflée dans son écharpe et sa morosité qui ne la quitteront jamais, l'une et l'autre. Elle avait cours à 8h 00 et se pointe tranquillement à 09h 20. Mais elle va pas prendre ses gamins de suite, ça va pas non ? Elle se boit d'abord son petit café pendant que les loulous attendent dehors dans la cour, en se caillant. Bref, ça annonce clairement la couleur.
Ouin Ouin consent enfin à faire une apparition en cours après la récréation. Oui apparition, car elle va chercher ses loulous avec un bon quart d'heure de retard et nous avons la surprise de les retrouver seuls dans la classe 10 minutes avant la sonnerie (inutile de vous dire qu'il n'étaient pas d'un calme olympien puisqu'on en a retrouvé deux sur les tables ...). Oui, Ouin Ouin était retournée en salle des profs se boire à nouveau son petit café. Alors, à ce stade, de deux choses l'une: soit notre café est particulièrement goûteux, soit elle a des actions chez Nescaffé. What else ?
C'est après une journée harassante de 2 heures de cours (oui, comme OuinOuin habite loin, elle ne veut pas faire les heures de cours de l'après midi) que la première journée de notre collègue se termine, le temps pour elle de mettre le grappin sur un prof pour du covoiturage.

Le second jour, Ouin Ouin instaure un petit rituel fort plaisant: elle vient taper à ma porte (avec sa classe aux basques) la deuxième heure de la matinée (mes 5° finiront par être blasés) et s'étonne de m'y trouver:
"Ben, comment ça se fait que tu sois là ?
-Je sais pas, sans doute parce que j'ai cours ici
-ben, et moi, j'ai cours où ?
-ben, euh apparemment pas ici. Mais fait voir ton emploi du temps, on va regarder ensemble. Si ça se trouve, y a une erreur.
-Mon emploi du temps ?
-Un tableau qui t'a été distribué où il est marqué quand tu bosses, avec quelle classe et surtout où. Un emploi du temps, quoi.
-Ah ! je sais pas ce que j'en ai fait. Je crois que je l'ai jeté.
- ....
- Alors, j'ai cours où ?
-(longue respiration abdominale) ok, ce que tu vas faire, c'est faire ranger ta classe devant ma salle dans le couloir. Je te la surveille deux minutes pendant que tu vas au secrétariat pour demander un nouvel emploi du temps.
- Au secrétariat, mais ça fait loin !
-C'est à 50 mètres.
- Ouais, ça fait loin.
- D'accord, alors tu comptes faire quoi ? Partir avec ton bâton de pélerin et ta classe aux fesses en faisant toutes les salles. T'aurais du me le dire, je t'aurais ramené des encyclopédies à vendre pour arrondir tes fins de mois.
-Alors, j'ai cours où ?
- (deuxième longue respiration abdominale, moins efficace cette fois-ci). Ecoute, on se connait pas, mais je te donne un indice, là je suis en train de perdre patience, et crois-moi c'est pas bon signe (je remarque alors que l'ensemble de ma classe hoche la tête à cette phrase, je sais pas comment je dois le prendre). Donc, un petit conseil, tu rassembles le peu d'énergie qui semble te rester, et tu vas chercher ton emploi du temps fissa !"
Je pensais en rester là. C'était mal connaitre OuinOuin qui tous les mardi, à la même heure, m'a refait le coup.

Un mercredi, j'entends tambouriner à ma porte, ce qui, sacrilège, sort mes 3° de leur sommeil léthargique. OuinOuin entre alors, échevelée et soufflante, et balance à la cantonnade, face à des élèves et un prof médusé:
"J'en ai marre, je vais péter un cable".
Me disant qu'il y a de fortes chances pour que cet appel hystérique, mais désespéré, s'adresse à moi, j'intime aux 3° de terminer leur exercice et je m'approche, mais en restant prudent, on sait jamais. Prenant alors ma voix la plus doucereuse:
" qu'est-ce qui passe Ouin Ouin ? allez raconte tout à tonton Will. Non, t'approche pas trop quand même ...
-J'en ai marre de cette classe, je la supporte plus ! Je me casse, j'en ai marre !"
Et elle se tire.
Me laissant planté là.
Avec ma classe.
Et surtout la sienne à l'autre bout du couloir.
Et tout à coup, j'ai un flash. Je revois un extrait du Maître d'école où Coluche remplace tous ses collègues et où il court d'une salle à l'autre ...
On n'a pas retrouvé trace de Ouin Ouin de toute la matinée.

Mais le clou du spectacle, (vous verrez que le terme n'est pas exagéré), OuinOuin sachant ménager ses effets, nous a été réservé pour son dernier jour (Dieu merci). La scène se passe dans la voiture de notre collègue qui a covoituré avec elle, et qui n'a pas volé sa médaille du mérite.
Il est huit heures moins dix, ils sont à 5 minutes du collège, et un cri perçant déchire le silence ouaté qui règne dans la voiture à moitié endormie:
"Vite, vite, arrête-toi là, vite !"
Notre collègue, craignant que Ouin Ouin ne redécore sa voiture d'un joli crépi de vomi, fait une embardée sur le bas-coté, manquant de se manger un arbre. Ouin Ouin descend de la voiture précipitamment, monte sur la petite butte juste en face, baisse son pantalon, et soulage une envie pressante, sous les yeux du collègue ahuri, qui nous a avoué avoir hésité à redémarrer en trombe à ce moment-là.
Je l'ai dit, ils étaient à 5 minutes du collège. Vous prenez une Ouin Ouin peu pudique, vous ajoutez un destin farceur, et vous obtenez le bus des élèves qui passe pile à ce moment-là !
Et oui, nos loulous ont donc eu une vision lunaire du meilleur effet dès 8 heures du matin. Inutile de dire qu'à 8 Heures 02, tous les élèves étaient au courant. Pour les profs, ça a pris 2 heures de plus. Il y aurait un intéressant sujet de thèse à faire sur la vitesse de propagation des informations chez le prof et chez l'élève.
Et dire qu'on emmenait nos élèves au planétarium du Palais de la découverte quelques mois plus tard, comment voulez-vous rivaliser ?

Certains élèves me parlent encore de OuinOuin quelques mois après. J'ignore s'il leur faudra une thérapie...

une dernière précision: l'écriture relève, selon Aragon, d'un mentir-vrai. Je puis vous assurer que tout ce qui a été raconté ici a été véritablement vécu.

*TZR: titulaire d'une zone de remplacement: le prof est amené à faire différents remplacements sur une zone géographique assez large (une fonction que j'ai exercée pendant 5 ans et qui me pend au nez l'an prochain si je veux quitter mon trou ...)

mercredi 3 mars 2010

et soudain, c'est le drame ....

J'adore ces moments-là !
Qu'on soit bien d'accord, ce n'est pas du sadisme (si, un peu quand même ... ), c'est simplement que voir les grands de ce monde chuter ainsi, alors qu'ils sont dans la magnificence de leur gloire, dieu que c'est bon pour le commun des mortels.
Imaginez les heures de préparation qui ont précédé ces instants. Le choix de la robe, les heures de maquillage et de coiffure, peut être même le régime draconien et les séances de sport pour apparaître en forme.
et quand en plus, il s'agit d'une icône, se voulant mystérieuse, évanescente, éthérée , qui se gamelle en trois mouvements, avouez qu'on est pas loin de l'orgasme.
Mais la video parle d'elle-même:



je me demande si elle a été désenchantée, après ça ...
J'adore, j'adhère !

Shutter Island


Dimanche, je devais aller voir, en bonne compagnie, Shutter Island.
On se pointe donc devant le ciné et nous découvrons avec horreur que la file d'attente se prolonge dans la rue, sur au moins 500 mètres.
Immédiatement, le prof de maths qui sommeille au plus profond de moi (mais alors profond, faudrait faire des fouilles mérovingiennes pour le retrouver ....) se réveille.
Il vous propose le problème suivant:



"A/ Sachant que
-a) un professeur de français, peu motivé pour corriger des copies qui l'attendent mais malheureusement doté d'une trop grande conscience professionnelle, a décidé de prendre le train à 16h 44, mais que cinéphile dans l'âme, il veut voir le dernier Scorsese.
- b) la séance est à 13 h 55 et le flm dure 2 h 17
- c) le ciné est à une dizaine de minutes de la gare à pied mais comme le dit prof de français porte un sac bien lourd et est sujet aux crampes dans les mollets, il faut bien compter 15 minutes
==> le prof de français trop consciencieux pourra-t-il voir le film et chopper son train ?

B/ Sachant que:
- a) il y a une file d'attente de 500 mètres environ dans la rue
-b) la file avance de 2 mètres toutes les 5 minutes
-c) un bus passe toutes les 10 minutes dans cette rue sans trottoir où le public attend
==> le prof de français pourra-t-il toujours assister à sa séance ?
==> combien de passant seront écrasés en une heure ?
==> quel est l'âge du capitaine (ou ici du projectionniste) ?"

Bref, vous l'aurez compris, au bout de 20 minutes d'attente, je m'en suis retourné vers la gare, la mort dans l'âme et maudissant les copies qui m'attendaient sur mon bureau.

Mais rien n'est jamais perdu. Hier, après ma séance de yoga où j'ai brillamment fait la position du héron cendré, je me suis précipité au ciné pour rattraper la frustration de dimanche. Et je n'ai pas été déçu.

Le pitch: Di Caprio est un marshal envoyé sur Shutter Island, une île abritant un hôpital psychiatrique, pour y retrouver une dangereuse prisonnière évadée ayant noyé ses trois enfants.

Le film commence sur un Di Caprio trempé et mal en point. Regardant à travers le hublot du ferry qui l'amène sur l'île, il dit qu'il ne supporte pas l'eau. Et l'âme de midinette qui sommeille en moi (beaucoup moins profond que le prof de maths, ce coup-ci) ne peut s'empêcher d'y voir un clin d'oeil à Titanic. Que nenni ! Il s'agit d'un premier indice...
Car Shutter Island bénéficie avant tout d'un scénario brillant, qui ne se contente pas seulement de reprendre les moments de bravoure attendu de ce type de films, mais les revisite de façon originale, perdant le spectateur comme le personnage principal dans ce dédale qu'est l'île.
Scorsese est magistral. Il joue sur le hors champ pour mieux suggérer et tire de quelques allumettes ses meilleures trouvailles visuelles. Il prend un malin plaisir à perdre son spectateur avec de nombreux faux raccords qui le plongent dans un sentiment de malaise et de perplexité. Quelque chose ne tourne pas rond, mais quoi ? Lors d'une scène, c'est un verre d'eau qui disparait du champ, puis une feuille de papier. Plus tard, un mauvais cadrage ... A quoi joue Scorsese ?
Le marshal est un être torturé, qui a perdu sa femme dans un incendie et a délivré un camp de concentration. Ce lourd passé se rappelle à lui lors de formidables séquences oniriques. Le jeu des couleurs y est particulièrement réussi. La glace et les teintes bleutées pour Dachau, le jaune et l'ocre pour l'appartement où Michelle Williams, troublante et bouleversante, se consume dans les bras de son mari. Chaque lieu ou chaque époque est travaillé soigneusement, avec une atmosphère juste et colorée.
Enfin, Di Caprio est de tous les plans ou presque. Et montre une fois de plus son immense talent. Anxieux ou déchiré, il traduit sans surjouer tous les tourments de son personnage torturé.


Bien plus qu'un simple film policier, Shutter Island pose la douloureuse question des marges de la folie. Jusqu'où un être humain est prêt à aller pour se protéger de ses douleurs ? Ou pour conserver le souvenirs des amours défuntes ...

5/5