mercredi 27 octobre 2010

Cellulaire, Stephen King

Avec Stephen King, c'est une longue histoire d'amour.
Qui a commencé à l'adolescence.

Vous entrez dans une zone de flash back

Souvenir ému de mon premier roman du roi de l'épouvante, Ca. En sixième, j'accompagnais ma mère et ma grand mère au supermarché du coin, après le dernier cours de la journée. Pendant que le gynécée vaquait aux occupations commerciales, je squattais le rayon bouquin du Super U. et squatter me semble le terme exact : affalé à même le sol, avec un bouquin dans les mains et daignant à peine rentrer mes tiges quand un charriot passait. Quand j'y pense, j'étais sacrément culotté. Mais on m'a jamais fait une seule réflexion.
Au début, je lisais la série des Petits Nicolas. Puis les Pagnol (et là, j'arrivais à repartir avec un nouveau roman chaque semaine. devant la culture, ma mère ou ma grand mère s'inclinait et m'offrait le roman désiré). Mais bien vite, mes regards furent attirés par les couvertures sanguinolentes des romans de Stephen King.
Il m'a fallu du temps pour oser aller plus loin que la contemplation de cette couverture :
J'ai d'abord feuilleté les 3 tomes, prudemment, d'un index tremblant. Je savais que je transgressais certaines règles: ces livres ne m'étaient normalement pas destinés (la preuve en est : ils se trouvaient sur la dernière étagère.). Puis je suis tombé sur une scène qui m'a scotché dans tous les sens du terme : celle du lavabo avec Beverly (pour ceux qui ont lu le roman). Cet extrait a été une révélation pour moi : un livre pouvait autant foutre la frousse qu'un film ou une série B. Des mots, des séries de mots pouvaient procurer une véritable angoisse, avec toutes les sensations physiques qui accompagnaient ce sentiment. Le pouvoir des mots sans le choc des images.
On était à la fin de l'année scolaire, et je me suis donc offert les 3 tomes de Ca. que j'ai dévorés. C'est bien simple, j'ai joué les autistes pendant tout mon temps de lecture. et l'identification a joué à plein. Une sensation vraiment délicieuse. J'ai ensuite enchainé avec les classiques Cujo, Christine, Carrie ....
Puis la fièvre est retombée. Mais ne s'est pas éteinte. et inconsciemment, j'ai instauré le rendez vous annuel Stephen King.

fin de la zone de flashback.

Cette année donc, Cellulaire que j'avais acheté depuis un moment, et que j'ai retrouvé par hasard dans les cartons.
Le pitch ? Un virus est envoyé aux hommes par leur portable. Quand ils reçoivent le signal, leur mémoire est effacée, ainsi que leur humanité, les réduisant à l'état d'animal sauvage, de mort vivant, s'attaquant à n'importe qui. Seule une poignée d'hommes arrive à s'en sortir. Ils se regroupent, s'organisent. Parmi eux se trouve Clay, un dessinateur qui espère que son fils n'a pas utilisé son portable et qui va tout mettre en place pour le retrouver et le rejoindre...
King puise chez romero (le retour des morts vivants) ou Chez Wells (la guerre des Mondes) son inspiration puisque son roman est construit sur l'opposition entre deux clans : les phonistes qui ont été contaminés et les normaux. Peinture d'apocalypse où les seconds essaient de survivre, avec le cortège de personnages voire les idées reçues inhérentes au genre : une mamie témoin de Jehovah, un réceptionniste suicidaire etc...
Première remarque : le road movie passe difficilement à l'écrit. L'ennui gagne très vite le lecteur, car les épreuves que doivent affronter les normaux sont finalement peu intéressantes (trouver des armes à feu, un endroit où dormir etc...).
Second point négatif : les personnages ne sont pas suffisamment fouillés. Oui, c'est une première chez Stephen King, mais à l'exception de Clay, la peinture des protagonistes reste trop superficielle pour que l'on puisse s'attacher vraiment à eux. Résultat : l'identification ne fonctionne pas, et l'on se tamponne dans les grandes lignes de ce qui peut leur arriver. Le calvaire de l'un des personnages principaux devrait nous tirer des larmes. Or on compte les pages ...
Enfin, l'intrigue elle même patine. Pas de grand méchant, un dénouement beaucoup trop ouvert et rédhibitoire dans un livre long, et un ensemble assez répétitif. L'univers décrit manque de cohérence, contrairement à Désolation, par exemple.
Malgré quelques moments de bravoure où le rythme cardiaque du lecteur s'accélère un peu, Cellulaire est un roman décevant et plat.

1/5

dimanche 24 octobre 2010

les amours imaginaires


"On s'est connu, on s'est reconnu, on s'est perdu de vue, on s'est reperdu de vue ..."

c'est sur le canevas de Jules et Jim que brode le nouveau film de Dolan. 1 fille, deux garçons, 3 possibilités. Amours à géométrie variable.
Si chez Truffaut, la zizanie apparaissait sous les traits de Jeanne Moreau, c'est ici un ange blond, un "bellâtre très à l'aise" comme le qualifie la première fois Marie, l'un des pôles du triangle amoureux, qui l'incarne. Un monstre d'égoïsme, tout simplement heureux qu'on l'aime et ne semblant pas se rendre compte des dégâts qu'il occasionne autour de lui.
Gravitent donc autour de cet orbite Francis et Marie. Dès les premières scènes, la rivalité se met en place : filmés de dos, chacun va lancer un regard à la dérobée sur l'objet du désir.
Ellipse temporelle et Francis appelle Marie pour lui apprendre qu'ils vont boire un pot ensemble avec l'éphèbe. Chacun de fourbir ses armes d'attraction, chacun de marcher vers la proie d'un pas décidé, chacun de s'émouvoir de la réaction de l'homme désiré, en l'occurrence un sourire.
Mais l'ellipse est ici importante car à l'information finalement presque secondaire donnée par Francis à Marie et au spectateur ("devine avec qui on va boire un verre ? " ) manque la principale : qui a contacté qui ? qui a vraiment invité qui ?
Car Marie et Francis ne vont cesser de traquer les signes, les paroles de leur proie pour nourrir leur amour imaginaire. Un "j't'aime" balancé spontanément par Nicolas doit être décortiqué puis rejeté par Marie, et servira même d'arme contre Francis. Quand ce dernier rencontrera la mère de Nicolas (Anne Dorval, La Brenda du Coeur a ses raisons), il trouvera de quoi alimenter sa chimère.
La rivalité ira crescendo, l'espoir également, à la hauteur de la cruelle désillusion qui les attend au bout du chemin.
C'est poignant car les deux amoureux éconduits ne se sont pas uniquement bercé d'illusions. Nicolas les a (volontairement ou pas, dur de le dire) maintenus dans leurs espoirs, en envoyant une lettre, en jouant de certaines doubles expressions ("j'aime bien être au milieu, qui m'aime me suive ... "). On compatit donc avec eux, plutôt que de les juger et de les condamner.
A mon sens, la toute dernière scène en est d'autant plus ratée et maladroite, un clin d'oeil ironique inutile.
Car si le film est globalement réussi, il l'est surtout quand il ne cherche pas à l'être, quand il est dans l'épure et pas dans la démonstration. Les scènes les plus réussies sont à mon sens les petites pastilles qui émaillent l'histoire principale. On y voit des jeunes gens parler de leurs échecs amoureux. A l'image de cette fille, sorte de clone québécois de Camélia Jordana, qui au début prête à rire puis qui émeut quand elle avoue qu'elle a craqué et qu'elle s'est dévoilée. La scène est simple, mais l'émotion point, naturellement.
En revanche, le film devient particulièrement agaçant quand Dolan prend plaisir à visuellement surligner trois fois ce que le spectateur avait compris la première fois. Les ralentis incessants deviennent irritants, car presque mécaniques. D'autres procédés sont trop scolaires, comme cette scène où l'on voit Francis, de dos, éclairé par une lumière rouge, descendre (une fois encore au ralenti) les escaliers après s'être pris une claque monumentale, métaphore à peine cachée de la descente aux Enfers.
Des tics stylistiques d'autant plus regrettables que Dolan a un regard aiguisé sur les relations amoureuses actuelles, faussées par Internet ou l'ultramoderne solitude. Comme un élève surdoué qui n'aurait pas encore le cran de se défaire des techniques apprises, qui aurait peur de sa propre audace.
Ces réserves mises à part, Les Amours imaginaires reste un très beau film, émouvant et profond.
4/5


vendredi 22 octobre 2010

rhaaaaaa les vacances !!!


Oui, je sais, je vais me mettre une partie de mon lectorat à dos, mais dieu que ça fait du bien d'être en vacances. Le boulot a été harassant ces deux dernières semaines et l'ensemble des profs ainsi que des élèves est épuisé. Oui, quand tu en arrives à rêver d'ouvrir une baraque à frites, c'est que le seul mot qui qualifie les vacances est "salutaire".
J'ai enchaîné les réunions parents profs, et ça déjà ça te met bien sur les rotules. Je me sens toujours d'une inutilité pendant ces rencontres. Et puis c'est pas en 7 minutes montre en main (expression à prendre ici au sens littéral ...) que tu vas sortir le pays de la crise ou le cul des ronces, au choix.
et puis franchement, chaque année, t'as le droit aux mêmes poncifs. T'as juste la tête des parents qui change, et encore ...

"et pourtant, elle adore lire"
(euh, ouais, et pourtant, je vois pas le rapport ...)
"moi à son âge je ne faisais pas autant de fautes que ça"
(ben dans la dernière bafouille que t'as écrite sur son carnet, permets-moi de te dire que le doute n'est pas exclu ..)
" pendant les vacances, je lui fais faire trois dictées par jour"
(trois ? c'est pas assez, faut augmenter la cadence ! Non, ça va pas l'aider mais si pendant les vacances, je peux faire chier votre fils autant qu'il me les brise en cours, ça me ferait un petit plaisir, tiens !)
"vous avez pas un truc pour qu'il lise davantage ?"
(si, une claque dans la gueule ou la chaise électrique, c'est radical )
" tu vas voir, tu seras privé de facebook, msn, twitter, dofus, ps2, ps3, ds ..."
(chaque année, la liste rallonge et moi, je capte de moins en moins. bordel, je vieilliiiiiiiiiiis !!!!!)
"mais en même temps, s'il lisait plus, il serait meilleur en orthographe"
(va voir le premier parent. je lui ai déjà expliqué qu'il y avait aucun lien de cause à effet.)

et puis, t'as toujours le même type de parents:
* l'agressif : lui, il a un souci à régler avec la gent professorale. apparemment, il en a chié quand il était au bahut, et donc maintenant qu'il est adulte, il va te le faire payer. Une seule solution: faire le dos rond, et lui filer en douce l'adresse d'un psy.
* le "je-te-soutiens-en-apparence-mais-en-vrai-c'est-petit-coco-que-je-soutiens": celui là, il est fourbe. au moins avec l'agressif, tu sais où tu mets les pieds. Avec lui (et d'ailleurs souvent elle, désolé mesdames) il te faut un petit temps pour comprendre que sous ses airs de béni ouioui se cache l'ennemi qui va te poignarder dans les minutes qui arrivent.
* le "quand je tiens un crachoir, je le lâche pas": les premières années, tu sais pas trop comment t'en dépêtrer, surtout qu'en l'occurrence, il va t'aligner tous les poncifs précédemment cités. et puis, avec la bouteille, ben t'arrives à mettre les formes pour lui faire comprendre que maintenant, faut qu'il mette les voiles, et fissa.
* le "mais qu'est-ce que tu fous là ?": son enfant est juste le meilleur élève de la classe, il bronche pas, il bouge pas une oreille, il participe toujours et c'est très pertinent, c'est bien simple dans le Larousse, y a pas assez de synonymes pour l'enterrer sous les éloges. et là le parent te sort : "oui, mais au dernier contrôle, il a eu que 18". dans ce cas là, ben tu tends le paquet de mouchoirs ...
* la guest star: son enfant, c'est tout le contraire du précédent: il glande rien, il fout le bronx, il a jamais son matos, et t'attends la réunion parents profs pour te le farcir, quelque chose de beau. Sauf que la guest star ne vient jamais à la réunion. Sauf que bien sûr, elle a au préalable demandé un rendez vous pour te rencontrer aux dernières heures. et que comme t'as une conscience professionnelle, tu l'attends en pensant que c'est juste un retard.

et puis parfois, t'as des surprises (et pas agréables, dans ce cas, les surprises ....). Comme cette mère qui avait photocopié une rédaction que j'avais corrigée, et qui avait surcorrigé. résultat des courses, elle aurait mis plus à sa fille. "je crois qu'on peut donc s'entendre. Regardez, si vous lui rajoutez 3 points, elle passe à 12, et elle maintient sa moyenne de l'an passé."
"effectivement, je pense qu'on peut s'entendre, si je vous mets ma main dans la la gueule, je peux partir plus tôt, et je maintiens ma moyenne de l'an passé".
Ah oui, assez récurrent aussi cette année, le "mais avec vous, mon enfant est terrorisé". Désolé, mais votre gosse m'a pas encore fait d'arrêt cardiaque, je m'arrêterai une fois la tâche accomplie.

Bref, c'est bien usant ce type de réunions.
rajoutez à ça les gamins eux mêmes épuisés donc irrités donc irritants, des collègues bien fatigués (quand on se dispute pour un morceau de sucre, j'ose espérer que c'est imputable à la fatigue) le boss bis qui t'efface tes notes parce qu'il balbutie avec le nouveau logiciel, cette saleté de note pédagogique qui n'est pas tombée alors que tout le reste de l'équipe a eu la sienne, et vous obtenez un Will pas mécontent d'être en vacances.




dimanche 17 octobre 2010

vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu


Attention, film drôlement pessimiste.
Je n'ai pas une culture cinématographique franchement étendue concernant Woody Allen, puisqu'à ce jour, je n'ai vu que Harry dans tous ses états et Meurtre mystérieux à Manhattan.
Mais le dernier Woody est très drôle sur la forme et désespéré sur le fond.
une poignée de personnages en crise au début du film vont se croiser, essayer de maîtriser leur destin, changer de vie pour au final se retrouver dans une situation certes différente que celle au départ, mais tout aussi problématique.
Le film commence donc par un clin d'oeil puisque le générique propose la chanson "Quand on prie sa bonne étoile". Un personnage de voyante un peu manipulatrice étant au coeur de l'histoire, l'ironie de Woody se fait clairement sentir.
Helena (Gemma Jones, naïve et horripilante à souhait) vient de se faire plaquer par son mari Alfie (Anthony Hopskins ), en pleine crise de la soixantaine et qui ne tarde pas à retrouver "l'amour" dans les bras de Charmaine, une blonde siliconnée, volage et vulgaire.
De son coté, Sally, le fille d'Hélena et Alfie, voit son mariage prendre l'eau avec Roy, écrivain raté qui lorgne la voisine d'en face à travers sa fenêtre.
Helena décide donc de consulter une voyante qui lui donne ce qu'elle attend : l'espoir. Mais cet acte aura des conséquences sur la vie de chacun des personnages, empêtrés dans un destin cruel qui les dépasse. Alfie va très vite regretter son choix initial qui le pousse à dilapider sa fortune et à avaler du viagra à haute dose. Roy laissera tomber sa femme pour séduire la voisine, mais une fois installé cez elle, regardera avec regret sa femme à la fenêtre d'en face. De plus, une sale combine et un quiproquo téléphonique mettront probablement fin à sa carrière. Enfin, Sally (divine Naomi Watts) va se rendre ridicule en se jetant au cou de son patron (Antonio Banderas). La scène où elle lui avoue ses regrets et ses sentiments et où il répond qu'il lui souhaite le meilleur pour la suite de sa vie professionnelle est à l'instar du film: le spectateur rit mais s'instille en lui un sentiment de malaise, et c'est finalement la mélancolie qui l'emporte.
Seuls deux personnages, les plus fous et pourtant les plus âgés, vont s'en sortir en prenant le pari le plus risqué dans la vie : celui de l'amour.
Inversion des rôles: les parents déraillent, les enfants raisonnent et peu s'en sortent.
Férocement noir ...

3/5

samedi 9 octobre 2010

kaboom


je rentre tout juste du ciné et vous livre à chaud ma critique.
D'habitude, il me faut un certain temps pour digérer le film, l'interpréter plus finement (par exemple, la critique de Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu est en gestation).
Pour Kaboom, de Gregg Araki, c'est complètement différent car le film procure un tel plaisir, une telle euphorie qu'il serait criminel de laisser tout ça en suspens.
Araki parvient dans ce film à ranimer la fonction première, originelle du cinéma, celui de Méliès: faire du spectacle, voire du spectaculaire.
C'est à un défilé de Freaks digne des plus grandes attractions que nous convie le cinéaste avec ce film, brisant ou plutôt explosant (Kaboom signifie Badaboum) les codes de différents films (le collège movie, le film fantastique ou même tarantinien). Comme un enfant gâté qui casse ses jouets, Araki déconstruit chaque type de films.
Le pitch ? Y en a-t-il vraiment un ? Smith est un jeune mec s'interrogeant sur sa sexualité. Il couche avec London, mais fantasme sur son colloc (et franchement, vu la bombe, on le comprend). Sa meilleure amie sort avec une fille qui va s'avérer être ... une sorcière. Rajoutez à ça un Messie shooté, des hommes portant des masques d'animaux et une disparition mystérieuse. Bref, une salade niçoise qui n'a rien d'indigeste.
premièrement parce qu'à aucun moment le cinéaste ne se prend au sérieux, et décide de prendre de haut son spectateur avec des références écrasantes.
et Deuxièmement parce que les répliques sont à hurler de rire. La scène ou London couche avec un bellâtre trop rapide à son goût et peu doué pour le cunilingus va vite devenir culte.
Le film monte en crescendo en drôlerie, en faux suspense et le dénouement, qui finalement, n'en est pas vraiment un (et donne son sens au titre) est traité de façon nonchalante et distancée. Le spectateur se sent il lésé ? A aucun moment, car il a vite compris que le film ne rimait plus à rien.
Araki dénonce doncde façon finalement assez subtile l'illusion théâtrale du cinéma. L'apologie de l'explication selon Darrenbach est refusée et moquée, et l'on touche à la distanciation brechtienne. Comme quoi, on peut brasser de grands concepts avec du rire en barre.
Plus efficace que 3 Xanax.
5/5

vendredi 8 octobre 2010

y a des jours comme ça ...


Attention lecteur, tu vas rentrer en pleine zone de "je me plains pendant trois heures". t es prévenu, t'es prêt ? go !!!!!!
Donc, je commence ma journée comme d'hab' en allant chercher la collègue avec qui je covoiture. Sauf que travaux donc déviation donc pas le temps de faire mes photocops, bref, une première heure assez merdique. Mais passons
je me dis que la seconde, ça ira mieux. Sauf que dans la seconde, j'ai passe muraille qui fait des siennes depuis un moment. On est en Octobre, et ça fait déjà une semaine qu'elle est sous fiche de suivi. On a déjà fait une commission éducative pour elle, et ça a été, comment dire , inattendu ...
figurez-vous que la mère a refusé de venir, elle est restée dans la voiture car "c'était trop éprouvant" pour elle d'entendre tout ce qu'on allait dire sur sa petite protégée (qui au passage s'était entre temps tirée, The Bogoss ayant été obligé d'aller la chercher, et qui résisterait à The Bogoss ? ).
Passe Muraille a brillé à son contrôle de cours hier puisqu'elle a obtenu un 0/10. Elle devait faire signer son contrôle ainsi qu'un mot pour aujourd'hui. Levez la main ceux qui sont surpris d'apprendre que l'innocente pucelle n'avait rien fait de tout ça. Vous rajoutez une attitude qui commence à me plaire et vous obtenez un prof excédé qui décide d'appeler la mère dans l'heure qui suit.
idée du siècle numéro un.
elle décroche et j'entends :
"oh non, pas eux, pas encore !"
me suis demandé si je lui faisais le coup de "Bonjour Lucienne, radiocouillon à l'appareil ! Lucienne, vous venez de gagner un Voyage au Maroc grâce à radiocouillon !!!"
Bref, je me présente (soupir) et je lui expose les faits ou plutôt j'essaie de lui exposer les faits. Parce que c'est ue avalanche d'insultes, de menaces et de plaintes qui me tombe dessus.
Je vous livre donc la coulée verbale et entre parenthèses, mes réactions :

"Oh non, mais là c'est bon. Vous comprenez pas que je suis traumatisée ! vous m'avez traumatisée ! (merde alors, j'ai ce pouvoir moi maintenant ? va falloir que je teste !)Je sais que Passe Muraille vous pose problème mais moi je jette l'éponge ! J'en peux plus que vous me harceliez comme ça ! (sexuellement ?) Parce que vous des êtes des incapables, je dois subir votre incompétence ! Moi je travaille au téléphone ! (rose ? )Et vous monopolisez mon outil de travail, là ! Je vais porter plainte contre vous pour Harcèlement moral (bien sur, et la marmotte ...). Quand c'est pas vous, c'est la+ le nom de la principale, et quand c'est pas la ...., c'est le prof de maths ou la CPE. Vous avez quoi contre ma fille dans ce collège ? (Ben comment te dire, ta fille est conne ! ) C'est la première fois que je vois ça ! (Ben oui, je m'en doute, elle est scolarisée depuis Septembre après deux ans "d'études" à domicile, sois logique, ma grande, c'est normal que ça soit la première fois !). De toute façon, ça va plus durer comme ça longtemps parce que moi je vais en finir, vous entendez je vais en finir ! (attends, elle se croit où là ? Chez SOS détresse amitié ? "appuyez sur le bouton / rappelez moi d'une cabine qui fonctionne"). Et puis, puisque c'est comme ça, moi je vais chercher ma fille à midi. (m'en fous, je la vois plus de la journée , ta conne de fille) et puis vous la reverrez plus (ah là ça devient intéressant ! ) parce que je vais déménager ce week end (nan, allez sérieux, arrête la déconne et passe moi une adulte, là). Parce que vraiment vous respectez pas mon travail, parce que je travaille moi ! (pour copier Baffie, j'ai envie de te dire "et moi, je me branle la bite ? ").

et la coulée a duré 5 bonnes minutes. Y a même un moment où j'ai demandé à la secrétaire à coté de mettre le haut parleur pour être sûr que je n'hallucinais pas. Je profite quand même d'un moment pour lui glisser qu'en l'occurrence, je souhaitais juste savoir si elle savait qu'il y avait une réunion parents prof, et si elle nous ferait l'honneur de sa divine présence. Elle me ressort l'argument du traumatisme et du harcèlement. et en remet une couche en disant que c'est scandaleux qu'on ose l'appeler sur son outil de travail. Ben connasse réponds pas si tu vois que c'est le collège, puisqu'apparemment tu t'en tamponnes de ta gamine.
je parviens tout juste à lui glisser "oui, c'est vrai, les profs sont d'une incorrection de s'occuper de la scolarité de votre enfant et d'essayer de trouver avec vous des solutions"
elle m'a raccroché au nez.
mauvaise joueuse !

sauf qu'elle a rappelé trois secondes plus tard, pour parler au bigboss. On l'a cherchée partout, et comme je me sentais responsable de la seconde avalanche sous laquelle elle allait bientôt se retrouver ensevelie, je suis resté dans les parages.

Idée du siècle numéro deux.
J'ignore s c'était pour calmer la tornade ou si vraiment elle le pensait, mais à la fin de l'entretien téléphonique (ou du monologue du vagin, devrais-je dire), la Bigboss sort "Oui, c'est vrai, c'est une erreur de vous appeler, on le refera plus."

de tout ça je sais pas ce qui me heurte le plus : le clash avec la mère, le fait de ne pas être appuyé par la direction ou ces parents qui se plaignent comme des vaches malades de leur progéniture et surtout des responsabilités qui en découlent. A chaque fois, j'ai envie de hurler: "Bordel, vous aviez le choix d'en avoir des gamins, et surtout vous en avez eu la chance. Alors fermez-la et assumez !"

C'est évidemment ce jour là qu'a choisi Kévina pour se montrer insolente et aller au clash avec moi. Elle a été chiante pendant la première heure de cours, donc je la garde un moment pour lui parler.

Idée du siècle numéro trois.

Attends, je l'ai retenue pendant la récré ! Pendant la récrée !!!!! elle a pas pu se recoiffer, tu comprends pas ! Bref, j'ai eu une caricature d'adolescente effrontée, vulgaire et butée.On était à une phalange du Fuck et du "je vous emmerde". A un moment, je lui ai dit :"ben écoute, puisque t'es pas capable de t'excuser correctement ou d'avoir une attitude respectueuse parce que tu veux aller en récré, je vais coucher tout ça sur écrit dans ton carnet de correspondance. Je suis sûr que lui, il sera à l'écoute". Devant sa mine déconfite, j'ai terminé par un sadique "bonne récré, Kévina !".
L'heure suivante, Kévina était métamorphosée. Capillairement et dans son attitude. Naméo !

bref, des jours où je me dis, comme les anglais "I gave at the office !"

des jours comme ça où on est vendredi mais où le week end vous parait loin, loin !!!!

lundi 4 octobre 2010

pourquoi faire simple quand ....


Ce matin, petite prise de nerfs en appelant le rectorat.
Je vous situe un peu le problème : une collègue (en fait une amie, bref) m'a proposé en mai de participer à Collège au Cinéma pour cette année. Le fonctionnement est simple (si t'arrives à trouver les crédits) : le prof emmène sa classe trois fois au ciné voir des films assez exigeants, que les merdeux n'ont pas l'habitude de voir. Autrement dit, c'est de la VOSTF et du noir et blanc, avec des thèmes comme la mort, l'exclusion, la critique sociale, la guerre et dieu dans tout ça ?
Je lui avais dit à l'époque que j'étais chaud pour le projet, mais que pour l'instant je ne pouvais pas donner de réponse définitive, puisque j'étais en attente d'une mutation (et qu'un fol espoir m'habitait alors).
Je me suis donc inscrit au projet fin juin.
Depuis, on se bat avec ma collègue pour trouver le budget, faire les devis des bus, savoir quel pathelin est le moins cher etc....
Y a une semaine, elle reçoit sa convocation, et moi que pouic. C'est assez étrange, car ça arrive par lot, ces machins-là.
j'attends deux jours, puis je monte au créneau. et aujourd'hui, j'appelle donc le rectorat.
le rectorat est une pieuvre, elle a 40 000 services différents, et bien souvent tu passes par 3 ou 4 postes différents avant d'avoir le bon. Dont acte ce matin.
Je tombe enfin sur la connasse personne responsable des missions (non, je n'affabule pas, on reçoit des ordres de mission, et parfois même les papiers s'autodétruisent !) pour lui demander la raison pour laquelle je n'ai rien reçu.
elle regarde puis me dit
" vous n'apparaissez pas sur ma liste.
et moi, d'une naïveté sans borne de lui demander :
ah bon ? génial ! alors je vous laisse mon nom et mes coordonnées et vous me rajoutez. J'avais peur que ce soit plus long, pour être honnête !
- Non, vous ne comprenez pas, vous n'apparaissez pas sur ma liste
-certes oui, mais vous allez m'y faire apparaître n'est-ce pas ? je vous laisse toutes les informations nécessaires et ...
-Non, vous n'apparaissez pas sur ma liste.
-Ok, je vois que ça va pas être si simple que ce que je pensais y a pas deux secondes, mais vous allez voir que si chacun d'entre nous y met un peu du sien, on va finir par s'entendre. Donc, JE N A PPA RAIS PAS SUR VO TRE LI STE, ça je l'ai très bien compris, mais en fait, j'ai besoin de cette formation sur les 3 films au programme sinon mon projet tombe à l'eau. Les formations ont lieu le mercredi et je ne travaille pas ce jour là. Et si c'est une question de défraiement concernant l'essence, c'est pas grave, je laisse tomber. Donc vous voyez que je ne suis on ne peut plus conciliant et surtout motivé puisque je vais me former à mes frais sur mon temps libre...
-Vous n'apparaissez pas sur ma liste.
-Ok, vous êtes une vraie personne ? ou ai-je affaire à un répondeur là ?
- Vous ne comprenez pas, vous n'existez pas.
-alors là, non , hein! je pense,( je vous téléphone) donc je suis ! j'ai lu mon Descartes, on me l'a fait pas à moi ! naméo.
-Vous n'apparaissez pas sur ma liste.
-et mon cul sur la commode ?
-Vous n'apparaissez pas sur ma liste.
-D'accord, Mme Kafka, est-ce que vous pourriez m'indiquer les raisons pour lesquelles vous ne voulez pas me rajouter à cette foutue liste ? C'est quoi ? c'est les basketts ? non, parce que là je vous jure que j'ai l'impression d'être dans une file d'attente pour le Queens ou une greffe de rein ...
- Ben, d'abord, c'est une question de budget !
-ok, je vous rappelle juste que je renonce aux défraiements d'essence, donc je ne pense pas occasionner la ruine de l'Education Nationale par ma présence à ce stage. C'est quoi votre deuxième argument ?
-Mon deuxième argument ?
-Oui le premier est nul. Vous en avez forcément un deuxième !
-Ben, ce serait pas éthique. Après je vais attiser les jalousies !
-Ouah, je vais attiser des jalousies en me rendant à 3 stages sur des films obscurs croato-bulgares ? je vous rappelle que ces stages ont lieu le mercredi toute la journée, et que 50 % des profs ne bossent pas ce jour-là. Ils auraient la jalousie un peu facile, vous trouvez pas.
-et puis surtout, y a des règles. Il fallait vous inscrire en Mai en passant par le serveur MT302 et retirer le formulaire 489 à retourner au bureau DIPER3, qui vous envoie ensuite un formulaire 589 de confirmation à renvoyer au bureau DIPER6.
-Ok, je comprends qu'après tout ça, me rajouter manuellement, ce serait trop simple. Pour vous dire au revoir, je remplis le formulaire 496 et j'envoie le tout à DIPER5 qui fait suivre ? "


résultats des courses: on va demander à un inspecteur académique d'appuyer ma demande de formation pour que je puisse participer aux 3 stages.
et quand je pense que je râlais quand on m'envoyait de force sur des stages à la mords-moi-le-zif (style grammaire et pate à sel ou orthographe et macramé ) y a quelques années ...



dimanche 3 octobre 2010

des hommes et des dieux


bon, alors, contrairement à toute attente (et en l'occurrence, les miennes) j'ai réussi être accompagné pour aller voir Des Hommes et des dieux. Bon, j'avoue que j'ai un peu épuisé mon réseau social, et que c'est Fab, mon frère de net, que j'ai réussi à avoir à l'usure.
Mais voilà, j'ai vu le fameux film dont tout le monde parle.
Pour dire la vérité, j'y suis allé un peu comme on fait ses devoirs, un peu comme quand je lisais Robbe Grillet à la fac: parce qu'il le fallait, parce que c'est bon pour ta culture générale.
Je vous passe le pitch, vous le connaissez tous et avouez qu'il y a quand même plus réjouissant.
mais devoir oblige.
et chef d'oeuvre au rendez vous.

le film commence par de longs plans séquences sur les paysages algériens (en vérité, le film a été tourné au Maroc) ou sur les moines en train de prier, vendre leur miel ou aider les habitants de Tibhirine ... Aucun effet de manche, pas de grammaire cinématographique hautement compliquée pour accentuer deux idées : la paix et l'harmonie qui habitent les personnages, et le fait qu'ils soient ouverts sur le monde bien que physiquement enfermés dans un monastère.
Et puis la violence commence à sourdre, d'abord par la parole, puis par une séquence insoutenable où des extrémistes tuent avec une rare sauvagerie des travailleurs étrangers.
Se pose alors pour moi la vraie question du film : celle du choix. Chacun des huit hommes de ce monastère se savent condamnés, ils savent que tôt ou tard, ils seront les prochains, alors quels choix faire ?
Partir et abandonner la population qu'ils aident (parmi les moines, il y un ancien médecin - Michael Lonsdale, incroyablement juste, malicieux et humain- qui soigne les habitants) ? Rester et mourir en martyr ? Accepter la protection de la police algérienne, corrompue ?
Pour incarner ces choix, Lambert Wilson, touchant et habité. Il est filmé en plan très larges dans la nature algérienne, si accueillante. Pour souligner sa solitude dans la prise de décision (il a été élu par les autres pour diriger le monastère).
Mais très vite, ses condisciples se rappellent à son bon souvenir et lui indiquent qu'il doit régenter le lieu comme un démocratie, chacun doit pouvoir faire entendre sa voix.
et chaque choix est écoutable, respectable. "J'ai choisi de devenir moine, pas de mourir en martyr", "je suis vieux, je suis malade, je veux rentrer en France". "Personne ne m'attend, j'ai déjà connu l'horreur, je reste". Xavier Beauvois rend attachant tous ses personnages, et nous fait accepter la lâcheté ou tout simplement les failles qui sommeillent en chacun de nous, sans juger.
Au fur et à mesure, les choix évoluent. L'un des moines subit une crise dans sa foi, et implore Dieu de l'aider. Il finira par se confier à Wilson en lui expliquant qu'il reste : sa vie ne lui appartient pas, il l'a déjà donnée à Dieu, alors qui peut encore venir la lui reprendre ?
Et chacun de cheminer et de choisir, dans l'apaisement et unanimement, de rester et de mourir. Le spectateur est alors déchiré entre deux sentiments car il partage l'apaisement des personnages, mais il assiste aussi à la montée de la menace, qui culmine lors d'une scène magistrale où un hélicoptère armé survole longuement le monastère. Les moines se réfugient dans le chant et communient entre eux en se serrant, la caméra les enferme dans un seul plan puis balaie chacun de leur visage où se lit d'abord la peur puis la détermination. iLs sont mis à l'épreuve, et valident leur choix.
Quelques jours précédant la tuerie finale, un nouveau moine arrive au monastère, porteur de nouvelles et d'objets de l'extérieur. il se fera arrêter par les extrémistes, lui aussi. Mais lui n'a pas eu le même cheminement dans ses yeux, et le parallèle est encore plus fort. Là où chaque moine se résigne (le terme ne correspond d'ailleurs pas vraiment à la réalité, puisque c'est au delà de la résignation), lui pleure et hurle à l'injustice.
Injustice face à une destinée qui ne nous appartient pas (pourquoi les tuer eux ? Pourquoi parmi ces moines, certains s'en sont sortis ? ...), mais à mon sens réflexion plus philosophique que religieuse.
Car quand je parlais de chef d'oeuvre, je faisais référence à la pluralité d'interprétations que ce filme engendre. Pour ma part, la clef du film est la question du choix et du fait de l'assumer jusqu'au bout. Pour Télérama (contre) il s'agit de la foi et de la religion (interprétation que je réfute: si le titre invite à cette lecture, il place l'humain en premier et relativise la question du christianisme avec le pluriel). Une collègue, qui a perdu son père d'une tumeur au cerveau (il se savait condamné) y a vu le courage que l'on peut déployer face à la mort annoncée ...

je vous invite donc à vous forger vous même votre interprétation, en épuisant votre réseau social pour trouver une âme charitable qui vous accompagnera.

5/5